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Magazine du Voyageur
  •   8 min. de lecture

C’est un métier qui fait fantasmer petits et grands, garçons et filles. Nous avons rencontré Elizabeth, hôtesse de l’air, pour en savoir plus sur son quotidien à 30 000 pieds d’altitude.

Bonjour Elizabeth. Pour commencer, pouvez-vous nous raconter comment s’organise la vie d’une hôtesse de l’air ?

Pour moi, les jours de la semaine n’existent pas. En ce sens que si vous me demandez si nous sommes lundi ou mardi, j’ai souvent bien de la difficulté à vous répondre. Mon horloge interne est plutôt basée sur les dates : je sais que je pars du 7 au 11. Ensuite, je peux planifier des activités le 12-13 et ainsi de suite. De ce fait, les jours passent très vite. Trop vite. Je pense déjà deux mois à l’avance quelques fois. Les activités spontanées sont pour moi difficiles à faire car avec mon ancienneté je travaille souvent le weekend. Cela a ses avantages : je vais faire les courses lorsqu’il n’y a personne dans les magasins, j’ai des semaines complètes de vacances qui ne sont pas de « vraies » vacances et j’ai du temps pour mes loisirs, sans courir après le temps.

Ma journée type : le décollage, le vol qui varie tout de même malgré la routine à bord car les passagers et l’équipage sont chaque fois différents. Ensuite on atterrit à une destination X et nous y dormons, souvent fatigués à l’arrivée. J’essaie alors de dormir un peu et je pars jogger dans la ville pour me réveiller. Par la suite, j’aime bien déambuler dans les ruelles des villes qui m’accueillent et déguster un bon repas, seule ou avec l’équipage. Ensuite, dodo et c’est reparti vers la maison ou vers une autre destination pour effectuer un vol le lendemain.

IMG_1565N’avez-vous pas le mal de terre une fois retournée au sol ?

Je dirais que j’ai le mal de l’air… plutôt que le mal de terre ! Pour moi, le retour à la maison c’est les espaces verts, les moments de calme. Je suis du genre casanière car je suis souvent hors du pays. Avec les années, j’ai tendance à vouloir rester chez moi. Quoique au bout d’un moment j’ai la bougeotte et me voilà déjà à planifier un voyage !

Vous qui êtes une spécialiste, avez-vous des trucs à livrer à nos lecteurs pour combattre le décalage horaire ?

Lorsque je voyage vers l’Ouest, mon truc c’est de rester éveillée le plus longtemps possible et de me coucher à l’heure du pays. Par contre, vers l’Est, j’ai souvent passé une nuit blanche pour m’y rendre. Il m’est très difficile de demeurer éveillée. Je dors souvent à l’hôtel trois ou quatre heures et je me force à me lever pour ne pas dormir trop longtemps. Je vais souper et je me couche à l’heure du pays. Quelques fois, je prends de la mélatonine ou de la valériane, des herbes naturelles pour m’aider à dormir, ce qui régularise mon sommeil. Mais honnêtement, le décalage horaire n’est pas un élément auquel on peut s’habituer. On essaie du mieux que l’on peut de l’apprivoiser, mais avec les années j’ai l’impression que c’est de plus en plus difficile.

Avez-vous déjà eu peur en avion ?

J’ai déjà eu la frousse pendant une seconde, le temps que je sache que l’élément en question était normal et que je n’avais rien à craindre. Souvent nous avons peur car nous ne connaissons pas l’environnement dans lequel on se trouve. À mes débuts, je ne connaissais pas encore les bruits de mon avion, ce qui était normal ou anormal. Dans ma carrière, je n’ai pas vécu d’incident, voire d’accident qui ai mis ma vie ni celle de mes passagers en danger. Je considère que mon bureau est très sécurisé et je remercie la vie qu’il en ai été ainsi jusqu’à aujourd’hui.

« J’apprends sur moi-même »

Vous avez choisi ce métier car vous êtes accroc au voyage. Vous pouvez nous en dire plus sur la naissance de cette vocation ?

Curieusement, je ne sais pas d’où je tiens cela. J’ai toujours voulu voyager depuis que je suis enfant. J’affichais des images de plages paradisiaques sur mon mur. Je voulais apprendre l’anglais, l’espagnol, un jour l’italien. Et puis, dès que j’ai été en âge de partir seule, ma mère m’a offert un mois d’immersion en Espagne et j’ai eu la piqûre. Depuis, je n’ai jamais arrêté de voyager. Backpacking pendant les étés ; Études universitaires en Espagne ; Stage en Équateur. J’aime me retrouver devant l’inconnu, devoir me débrouiller. J’ai l’impression que je deviens une autre personne. J’apprends sur moi-même, sur le monde, sur la vie, sur l’histoire. Voyager est une école en soi. Je découvre des facettes de ma personnalité. Les gens m’étonnent. Ils sont aidants ce qui me donnent de l’espoir car à la télé on nous présente souvent que le négatif. Et la planète Terre est si belle. Chaque voyage ou escale m’étonne et me donne le goût de continuer.

Eli Blog

Comment l’idée de partager vos expériences sur un blog – Les chroniques d’une hôtesse de l’air– vous est-elle venue ?

J’avais le projet de faire un livre de nos meilleures adresses comme personnel navigant. Pour faire connaître le projet, j’ai créé un blog. Comme je ne savais pas quoi écrire comme premier article, j’ai laissé mon cœur me guider et j’ai écrit un article sur le jus de tomate ! Un liquide qui répugne une hôtesse de l’air ! Car curieusement, il est comme la peste, lorsque l’un en demande tous en veulent… Mais pourquoi donc ?! Personne ne boit de jus de tomate à la maison…. Puis j’ai remarqué que mes lecteurs appréciaient ces courtes anecdotes et j’ai donc décidé de donner un côté humoristique à mon métier, à mes expériences en vol. Quatre ans plus tard, il m’aura conduit à publier deux romans.

Ce métier permet-il vraiment de découvrir les destinations ? N’est-ce pas frustrant de devoir repartir si vite ?

C’est comme si je visualisais un film par séquence pendant un an. Je visite chaque ville, petit à petit, à chaque voyage, une facette. Au bout d’un moment, on finit par trouver nos endroits préférés. Ça c’est lorsque l’on y passe qu’une nuit. Par contre, les horaires sont conçus quelques fois pour nous faire passer trois jours et plus dans la même ville en attendant le vol de retour. Là on a le temps de visiter, de découvrir vraiment l’endroit. Mais ces chances là sont rares. Lorsqu’elles arrivent, on en profite et on souhaite d’avoir un ami dans l’équipage pour nous accompagner. Frustrant ? Quelques fois oui, si l’on est à Barcelone, et d’autres fois moins, si l’on dort à Roissy…

IMG_2247Rome, Malaga, le Portugal…

Quelles sont les destinations que vous avez pu découvrir avec ce métier et qui vous ont laissé le meilleur souvenir ?

Il y en a beaucoup ! Je dirais d’abord Rome. C’est une ville qui est chaleureuse, ses habitants, sa nourriture, son architecture et son shopping me plaisent ! Et lorsque j’ai soif, partout où je me trouve, une fontaine est là pour me rafraîchir. Rien ne me déplaît à Rome. J’aime bien aussi toutes les escales qui m’offrent un accès à la mer. Je trouverai toujours une façon de me divertir là où la mer m’accueille. La ville de Malaga par exemple vaut le détour. Elle n’est pas trop grande, on peut facilement se retrouver, la mer est a proximité du centre-ville et il y a de l’action en soirée. J’aime également toutes les destinations au Portugal, surtout Lisbonne, la ville comme ses alentours. Mais pour être honnête, chaque escale me plait. J’essaie d’en tirer profit, même à Nantes, où c’est plutôt tranquille mais où j’ai pu dénicher quelques bonnes tables.

Vous écrivez : « Un jour, qui sait, tous les passagers à bord des avions seront gentils et courtois ! ». Cela veut donc dire que tous ne le sont pas… Avez-vous en mémoire des passagers particulièrement indélicats ?

Les passagers sont en général courtois sauf que bien sûr, s’il y a un passager qui l’est moins à bord, c’est souvent celui dont on se souvient. Je le dépeindrai ensuite dans mes écrits pour rendre l’anecdote divertissante. Je me souviens d’une passagère qui – désireuse d’aller aux toilettes – s’est levée en plein atterrissage. Les roues allaient touchées le sol d’une minute à l’autre. Je lui ai aussitôt dit de retourner à son siège pour sa sécurité. Elle m’a dit qu’elle allait vomir… Je lui ai reformulé que ce n’était pas sécuritaire mais elle a insisté. D’un mouvement de bras, avec indifférence, je l’ai laissée passer. Lorsqu’elle a eu terminé sa besogne, ce que je doute qu’elle ai fait car j’avais les oreilles collées sur la cloison des toilettes, elle s’est retourné et m’a pointé du doigt comme si j’étais une moins que rien. Elle m’a alors dit que je n’aurais pas du lui parler sur ce ton. Elle venait d’atterrir dans les toilettes à sa guise, nous étions encore sur la piste en roulage et elle me sermonnait…J’ai explosé ! Je peux vous dire qu’elle a regagné son siège. Pour la suite, je l’ai mise dans mon livre…

Régulièrement des hôtesses se plaignent du sexisme qui règne dans ce secteur. En avez-vous fait l’expérience ?

En ce qui me concerne, je n’ai jamais vécu de telles remarques ou en tout cas, pas que je me souvienne qui m’auraient rendu mal à l’aise. Je dois dégager un air autoritaire 🙂 Gare à vous ! Ha ! Ha !

A nos lecteurs qui sont de grands voyageurs, quels conseils pouvez-vous leur donner pour être de « bons » passagers ?

L’espace est restreint dans un avion et chaque centimètre est important. Les passagers ont un siège assigné et nous, nous avons l’allée pour travailler et la galerie pour se reposer. Si vous devez vous rendre aux toilettes, peut-être pourriez-vous regarder si l’allée est libre. Si nous devons dégager le passager en poussant le chariot aussitôt qu’un passager veut passer, nous ne servirons personne efficacement. Un peu de patience peut améliorer l’ambiance à bord. Un bon passager serait pour moi quelqu’un qui me remet son plateau avec les items disposés sur le dessus tel qu’il lui a été remis car n’oubliez pas que tout ce qui sort d’un chariot doit être remis à l’intérieur. Il me ferait aussi ses requêtes lorsque je passe avec le chariot de breuvages et non après mon passage. Il me remettrait ses déchets lorsque je passe avec la poubelle et que j’ai les mains libres. Enfin, pour terminer, il écouterait les consignes de sécurité car pour moi aussi il me pèse de vous les répéter. Oh j’oubliais ! Les merci et s’il-vous plait sont toujours appréciés en 2014 !

stop-eli2 romans pour connaître les dessous de l’aviation

Vous êtes également l’auteure d’un livre et bientôt d’un second qui sortira en mai. Pouvez-vous nous parler de cet autre projet ?

J’en suis si fière ! Il s’appelle « L’hôtesse de l’air » et c’est une véritable invitation à connaître les dessous de l’aviation. Scarlett, célibataire et hôtesse de l’air cherche l’amour mais elle n’est pas prête à mettre ses principes de côté pour être absolument en couple. Elle est prête à attendre. Elle a bien déniché un emploi de rêve, non ? Alors l’amour suivra assurément… Jusqu’à ce qu’elle rencontre, un beau pilote, qui sera tout le contraire de ce qu’elle recherche ! Choisira-t-elle l’amour ou la raison ?

L’histoire d’amour est une fiction mais tout ce que Scarlett vivra en escale ou à bord, est inspiré de ce que j’ai vraiment vécu en tant qu’hôtesse de l’air. Si ce n’est pas moi qui l’ai vécu, c’est l’un de mes collègues. Le lecteur pensera sûrement : « Wow, elle a l’imagination fertile ! », mais dites-vous bien que j’ai puisé ces anecdotes dans la réalité ! Pourquoi chercher lorsque l’on vit des aventures à chaque vol ? Le tome 1 est sorti en janvier et le tome 2 arrive en mai. Jusqu’à maintenant, mon roman connaît un véritable succès ! Le métier est si intrigant et demeure un mystère pour les gens. En tout cas, après avoir lu mon livre, vous en connaîtrez un peu plus sur les hôtesses et les pilotes 🙂

Merci et bons vols !

Les photos sont de Yanou Simard.

3 réponses à “Hôtesse de l’air : un métier de haut vol !

  1. Je rêve de ce métier depuis toujours merci pour cet article vous réaliser une moitié de mon rêve

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